Evangile selon saint Marc 6, 1-6
En ce temps-là, Jésus se rendit dans son lieu d’origine, et ses disciples le suivirent. Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. De nombreux auditeurs, frappés d’étonnement, disaient : « D’où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, et ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ? N’est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? » Et ils étaient profondément choqués à son sujet. Jésus leur disait : « Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison. » Et là il ne pouvait accomplir aucun miracle ; il guérit seulement quelques malades en leur imposant les mains. Et il s’étonna de leur manque de foi. Alors, Jésus parcourait les villages d’alentour en enseignant.
***
Dieu comme l’un de nous
Jésus se rend dans sa patrie et les disciples le suivent.
Une mission qui apparemment semble être un échec se transforme en une heureuse diffusion de la Parole : « il parcourait les villages d’alentour en enseignant ». On doute de lui à Nazareth et Marc note « il ne pouvait accomplir aucun miracle » et se corrige aussitôt : « il guérit seulement quelques malades en leur imposant les mains ». Jésus refoulé ne cède pas, il y a encore de la guérison, même pour quelques-uns, même pour un seul. L’amant rejeté ne déprime pas, il continue d’aimer, même quelques-uns, même un. L’amour ne se fatigue pas ; il s’étonne seulement (« et il s’étonna de leur manque de foi »). Notre Dieu ne porte aucune rancune.
Au commencement, les personnes réunies à la synagogue l’écoutent avec étonnement. Comment se fait-il que cette première impression se transforme si vite en scandale ? Probablement parce que l’enseignement de Jésus est totalement nouveau. Jésus est l’inédit de Dieu, l’inédit de l’homme ; il est venu apporter un « enseignement nouveau » (Mc 1, 27), mettre la personne avant la loi, renverser la logique du sacrifice, se sacrifier lui-même. Et ceux qui sont attachés à l’ancienne Loi ne se reconnaissent pas dans le prophète parce qu’ils ne se reconnaissent pas en ce Dieu qui s’annonce, un Dieu qui fait grâce à chaque enfant, qui répand sa miséricorde sans conditions, qui fait toutes choses nouvelles. Ces familiers, ces compatriotes se comportent comme nous, qui cherchons plutôt la confirmation de ce que nous pensons déjà et nous nous nourrissons de répétitions et de redondances, incapables de penser autrement.
Et puis Jésus ne parle pas comme l’un des maîtres d’Israël, avec leur discours « religieux » de haute volée, mais il utilise des termes simples, des mots de maison, de terre, de jardin, de lac, de tous les jours. Il raconte des paraboles profanes, que tout le monde peut saisir, où une pousse, une graine de moutarde, une figue au printemps deviennent les personnages d’une révélation.
Alors où est le sublime ? Où sont la grandeur et la gloire du Très-Haut ? L’humanité se scandalise de Dieu et de sa proximité. Pourtant, c’est précisément la bonne nouvelle de l’Évangile : Dieu s’incarne, il entre dans l’ordinaire de chaque vie, il embrasse l’imperfection du monde, qui pour nous n’est toujours pas compréhensible, mais que Dieu embrasse.
Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison. Car il n’est pas facile d’accepter qu’un menuisier ordinaire, un ouvrier sans études et sans culture, prétende parler en prophète, avec une prophétie laïque, quotidienne, qui circule dans les lieux de vie, en dehors du magistère officiel. Mais c’est précisément l’incarnation pérenne d’un Esprit qui, comme un vent de printemps chargé de pollen, ne sait d’où il vient ni où il va, mais remplit les anciennes formes et passe au-delà.
Bon dimanche
Fr. Thierry, O.SS.T.